Livre de Roland SEBBEN - ALGRANGE Cité aux 4 mines - La vie au village - Les maires de 1918 à 1945 (14)
Suite de mon livre (N°14)
Si la fin des hostilités apparut comme un immense soulagement pour les différentes communautés algrangeoises, on resta cependant très prudent. Pas de réactions violentes chez les Allemands, pas de démonstration de joie chez les Lorrains. De nombreux problèmes restaient en suspens, de plus, une majorité des habitants pensaient que 48 années d’annexion leur avaient apporté des acquis, notamment dans le domaine social.
Le 21 novembre 1918, le Commissaire de la République à Metz, M. MIRMAN, fit publier un arrêté concernant les municipalités. Tous les Conseils municipaux des communes lorraines étaient dissous.
Les Conseillers d’origine française de ces instances devaient se réunir d’urgence afin de désigner des habitants français en nombre égal à celui des Conseillers obligatoire par rapport au nombre d’habitants.
La séance inaugurale du retour à la France se tint le 28 novembre 1918. Après l’auto-épuration, il ne restait en place que Luc FLORANGE et Pierre PIGNON, Français de souche. Le 29 novembre 1918, la nouvelle municipalité s’est réunie dans la salle des séances pour élire le Maire, les 2 adjoints et les nouveaux Conseillers, auquel s’ajouta un délégué des vétérans de 1870 Eugène PESANT.
1919-1923 : François DORVILLÉ.
Né le 8 janvier 1884 à Metz, venant de Volmerange, il s’installa à Algrange en 1915. Marié, il fut réintégré Français après la guerre de 1914-1918. Il exerçait la profession de caissier de mine.
Les premières élections d’après-guerre eurent lieu le 30 novembre 1919. Un seul bureau de vote était ouvert sous la présidence du Maire Luc FLORANGE. Dans ce bureau, il y avait seulement 611 inscrits du fait des nombreux problèmes de réintégration et de naturalisation. Pour le premier tour, 413 inscrits vinrent remplir leur devoir civique. (67,7 % de participation) A l’issue de ce premier tour, 3 personnes arrivèrent en tête avec 220 voix ; MM. François DORVILLÉ, Eugène METZGER, Pierre ROLLES. Le Maire sortant, Luc FLORANGE, n’obtenait que 175 voix. La majorité requise étant de 207 suffrages, 21 personnes furent élues dès ce premier tour. Deux postes restaient à pourvoir et il fallut recourir à un second tour. Il eut lieu le 7 décembre et seulement 136 inscrits se déplacèrent. Le 10 décembre 1919, on procéda à l’élection du Maire, des deux adjoints et des Conseillers.
Conseil municipal élu en 1919.
Maire : François DORVILLÉ (caissier de mine).
Adjoints: Eugène METZGER (secrétaire), Jules VIDAL (chef d’exploitation), Conseillers: Pierre ROLLES (employé), Emile PERRIN (commerçant), Charles THIERSÉ (porion), Eugène HALLER (mineur), Nicolas SCHMITH (forgeron), Lucien WITZ (mineur), Ferdinand ANTON (ouvrier), Jacques ZAHM (mineur), Louis STECKLÉ (mineur), Jean SCHNEIDER (porion), Louis LEDIG (porion), Henri DENIS (mineur), Charles NIERENBERGER (ouvrier), Jules ARL (électricien), Jacques KREBS (ouvrier), Auguste CAILLEZ (chef d’exploitation), Victor HABERKORN (ouvrier), Frédéric WEIL (menuisier), Jules FOURRIER (hôtelier), Jean MOURER (ouvrier).
La rupture du Parti Socialiste s’était très vite répercutée au sein du nouveau Conseil municipal car dès la fin de l’année 1920, onze Conseillers se réclamèrent du communisme ; Déjà le 13 avril 1920, le premier adjoint METZGER avait présenté sa démission au Maire. C’est Lucien WITZ qui fut nommé second adjoint. C’était le premier signe de la montée en puissance des communistes au sein du Conseil.
De janvier 1920 à décembre 1921, se développa une vague de démissions au sein du Conseil tels: MM. SCHNEIDER, ROLLES, ARL, VIDAL. Des élections complémentaires devant avoir lieu, l’Administrateur de Thionville-Ouest, M. PHELIZON, ordonna une enquête sur les Conseillers démissionnaires. Les autorités arrivèrent à la conclusion que M. ARL avait manqué certaines séances " sous la pression d’une fraction du Conseil municipal " et il fut réintégré. Les élections complémentaires furent donc ajournées. Les membres communistes du Conseil municipal voyaient bien que la situation leur était favorable au sein de la localité et que de nouvelles élections leur permettraient de renforcer leur majorité.
Trois Conseillers communistes ; Eugène METZGER, Eugène HALLER et Jules FOURRIER démissionnèrent peu de temps après la réintroduction de M. ARL. Puis ce fut Victor HABERKORN et Charles NIERENBERGER qui démissionnèrent pour obliger les élections complémentaires, en signe de protestation contre le maire. Les élections complémentaires furent donc décidées et eurent lieu le 15 janvier 1922.
684 électeurs sur les 986 inscrits se déplacèrent pour élire 8 candidats sur les 25 qui étaient en présence. Ce fut naturellement 8 candidats communistes qui l’emportèrent avec plus de 300 suffrages. La majorité communiste au sein du Conseil municipal algrangeois était désormais toute puissante.
MM. Victor HABERKORN et Charles NIERENBERGER furent réélus. A la place des autres démissionnaires furent élus : MM. Charles HIMMELSBACH, Luc MULLER, Louis KIEFFER, Louis REUTENAUER, Antoine STEGLI, Etienne GULDNER.
De nombreux troubles au sein du Conseil municipal firent que le Préfet de la Moselle demanda, le 11 août 1922, des explications à l’Administrateur M. PHELIZON. Le Maire s’expliqua dans une lettre au Sous-Préfet en incombant la faute aux Conseillers communistes qui bloquaient toutes les délibérations. Parallèlement à cette lettre, les Conseillers communistes firent circuler dans la ville une pétition, afin de recueillir un maximum de signatures de personnes influentes, contre le Maire.
Après toutes ces péripéties, le 6 septembre 1922, le Préfet écrivit au Commissaire général de Strasbourg afin de lui demander également de nommer une délégation pour expédier les affaires et ceci jusqu’aux prochaines élections. Il proposa pour celle-ci : MM. LESCURE, KIEFFER et GRUSS. Sentant la situation évoluer en leur faveur, les communistes poursuivirent leur offensive.
Aucune solution de conciliation n’avait prévalu, il fallut donc se résoudre à la dissolution du Conseil municipal. La dissolution fut décrétée le 2 janvier 1923 et mise en application le 9 janvier de la même année… La délégation spéciale proposée fut chargée provisoirement d’assurer l’administration de la commune. Furent nommés : MM. Emile-Adolphe LESCURE, sous-directeur de la mine d’Angevillers ; Théophile KIEFFER, propriétaire et Paul-Charles GRUSS, contremaître. Très vite, la date des nouvelles élections fut fixée au 4 mars 1923 dans la localité....
1923-1925 : Victor HABERKORN.
Né le 16 octobre 1879 à Soufflenheim (arrondissement de Haguenau), de nationalité française, il s’était installé rue Foch en 1903. Au sortir de la guerre de 1914-1918, il était dans différents syndicats de la localité. Il exerçait la profession de mineur qu’il quitta par la suite pour s’installer à son compte dans une laiterie.
Lors de ces élections du 4 mars 1923, deux listes s’affrontèrent. La liste du Maire sortant : François DORVILLÉ et la liste communiste dirigée par Lucien WITZ et Victor HABERKORN. 926 votants se déplacèrent sur les 1188 inscrits. La liste du Parti communiste fut élue dès le 1er tour. Tous les membres recueillirent plus de 500 voix. Le 25 mars, alors que l’administration prévoyait comme Maire Lucien WITZ, ce fut Victor HABERKORN qui fut élu avec 22 voix contre une à Christian SCHUSTER.
Conseil municipal élu en 1923.
Maire : Victor HABERKORN. (mineur)
Adjoints : Lucien WITZ (mineur), Louis KIEFFER (ouvrier),
Conseillers: Charles HIMMELSBACH (commerçant), Louis REUTENAUER (ouvrier), Eugène HALLER (mineur), Etienne GULDNER (mineur), Luc MULLER (mineur), Charles NIERENBERGER (ouvrier), Chrétien SCHUSTER (ouvrier), Joseph WELSCHINGER (ouvrier) Jean HARZ (mineur), Jean CASPAR (menuisier), Chrétien STOCK (maçon), Pierre GRIMMER (ouvrier), Emile DURST (serrurier), Emile SCHEIBEL (mineur), Alphonse FELDEN (ouvrier), Emile PERRIN (commerçant), Jacques KREBS (mineur), Jean DECKER (mineur), René NICO (basculeur), Antoine STEGLI (ouvrier).
En 1923, Algrange devenait une des premières communes dirigées par des membres du Parti communiste (P.C.), avec Hagondange et Amnéville. En plein essor, le P.C. allait être stoppé dans son élan par une affaire qui fit couler beaucoup d’encre : " L’affaire WITZ ". En effet, des paroles dites lors d’un bal en l’honneur des conscrits dans la salle du café JOSTEN, le 28 mai 1923, arrivèrent aux oreilles du Préfet qui décida d’ouvrir une enquête menée par un Commissaire spécial du nom de SEVENE.
A la suite de cette enquête, la cour de Colmar condamna Lucien WITZ pour: " provocation de militaires à la désobéissance et propagande anarchiste ". Il dut s’acquitter d’une peine de prison de 3 mois ferme et d’une amende de 200 F. De plus, il fut suspendu de ses fonctions d’adjoint pendant trois mois et ce à compter du mois de juin, mais il était toujours présent dans les délibérations lors des réunions du Conseil municipal. Toutefois, la cour décida le 5 octobre 1923 de le révoquer purement et simplement.
Cet épisode semble avoir causé beaucoup de troubles au sein de la population algrangeoise. Le 9 décembre 1923, se tint en mairie la séance devant procéder au remplacement de Lucien WITZ et la création de 2 postes supplémentaires d’adjoints.
Le 20 janvier 1924 eut lieu l’élection de 3 adjoints au Maire. Louis KIEFFER, 2ème adjoint se désista du poste de 1er adjoint au profit de M. WITZ qui fut révoqué à tort, d’après le P.C., de son poste de premier adjoint. Et Lucien WITZ fut proclamé premier adjoint avec 16 voix pour et un blanc. Furent également proclamés adjoints : Charles HIMMELSBACH et Eugène HALLER. Dans la même séance René NICO fut déchu de son mandat de conseillers car il avait manquait plus de 5 séances consécutives. Mais la loi du 5 avril 1884 disait qu’une révocation entraînait une inéligibilité d’un an. L’affaire fut donc renvoyée devant le tribunal administratif qui décida en février 1924 de l’annulation de cette élection. Mais M. WITZ continua à être présent lors des réunions du Conseil.
Les membres des plus imposés de la commune prenaient part aux séances du Conseil municipal pour voter certains budgets. De nombreux points à l’ordre du jour n’étaient pas en concordance avec ceux du Conseil municipal, tels que l’indemnité de représentation du Maire, le payement des Vicaires, problème avec l’ancien Maire DORVILLÉ…
En 1924, sur les 23 membres qui devaient composer le Conseil municipal, seulement 18 étaient en exercice. Le 22 octobre 1924, le Conseil municipal décide qu’un poste de premier adjoint sera pourvu suite à l’annulation de l’élection de M. WITZ. Le 9 novembre, les membres du Conseil se sont réunis et c’est à nouveau Lucien WITZ qui fut réélu et qui siégea à nouveau aux côtés de ses amis au Conseil municipal. Cette élection fut déférée au Tribunal administratif le 22 novembre 1924 disant qu’il aurait dû être proclamé 2ème adjoint supplémentaire et non 1er adjoint.
Cette affaire fut donc le déclic amorçant le reflux temporaire du P.C. sur le plan municipal.
1925-1940 : Louis KOPP.
Né le 19 juillet 1876 à Audwiller, français réintégré, il s’était installé rue de Nancy. Il exerça la profession de tourneur.
Elections de 1925 :
Après les brillants résultats du début des années 20, les élections municipales générales de 1925 allaient être une cruelle déconvenue pour le P.C. Les élections fixées au 3 mai 1925 eurent lieu pour la première fois dans deux bureaux de vote ; un à la mairie avec 643 inscrits, et l’autre à l’école de garçons avec 748 inscrits.
Deux listes s’affrontèrent : celle de la liste sortante du P.C. menée par Victor HABERKORN et celle de la liste d’ordre menée par Louis KOPP. C’est lui qui avait participé en 1924 à la fondation de la : " Société de sauvegarde des intérêts communaux d’Algrange ". Ce groupement, composé de 23 membres, dont le président fut Jean-Baptiste SPECK, commerçant de la localité, comptait environ 140 adhérents. Elle avait pour but : " de mettre fin au gaspillage systématique des deniers publics auquel se livrait le Conseil municipal algrangeois ".
Au premier tour, 10 candidats obtinrent la majorité. MM. HABERKORN, HALLER, WITZ, HIMMELSBACH, CASPAR, REUTENAUER, SPECK, FELDEN, DURST, WELSCHINGER. Un second tour fut nécessaire pour élire les 13 autres candidats, il eut lieu le 10 mai 1925.
Le 17 mai 1925, les membres élus se réunirent et votèrent le maire et les adjoints. Louis KOPP fut élu Maire avec les 13 voix de son parti contre dix à Victor HABERKORN.
Conseil municipal élu en 1925.
Maire : Louis KOPP. (ouvrier-tourneur)
Adjoints : Charles FUCHS (employé de bureau), Nicolas BOURGON (aubergiste)
Conseillers : Alexis SPECK (délégué mineur), Antoine WASSNER (boulanger), Charles HIMMELSBACH (commerçant), Louis REUTENAUER (ouvrier), Eugène HALLER (délégué mineur), Joseph WELSCHINGER (ouvrier), Lucien WITZ (délégué mineur), Michel MOHR (mineur), Emile DURST (serrurier), Alphonse FELDEN (contremaître), Laurent BERGANTZ (ouvrier aux forges), Victor HABERKORN (marchand de bière), Camille GREBER (ajusteur), Pierre TACK (chef d’équipe maçon), Charles RENNER (ouvrier aux forges), Joseph MATHI (cheminot), Frédéric SCHROEDER (mineur), Lucien Pierre WILLAR (mineur), Pierre Nicolas SCHARF (mineur), Jean CASPAR (menuisier).
Elections de 1929 :
Ces élections n’apportèrent que très peu de modifications au sein du Conseil municipal. Après l’effervescence du début des années 20, la vie municipale algrangeoise était à nouveau tombée dans la monotonie.
Les élections municipales eurent lieu le 5 mai 1929, deux listes s’affrontèrent : celle de " l’Union Communale " avec à sa tête le maire sortant Louis KOPP et la liste du " Bloc Ouvrier et Paysan ". Trois bureaux étaient ouverts et au premier tour la liste d’Union Communale obtint facilement la totalité des 23 sièges. Le 12 mai 1929, les membres élus se réunirent pour voter le Maire et les adjoints. Louis KOPP fut réélu Maire avec 20 voix contre 3 pour Joseph MATHI.
Conseil municipal élu en 1929.
Maire : Louis KOPP. (ouvrier-tourneur)
Adjoints: Charles FUCHS (employé), Nicolas BOURGON (aubergiste) ainsi que deux adjoints supplémentaires : Nicolas JAPPELLE (invalide) et Joseph MANSION (épicier)
Conseillers: Laurent BERGANTZ (électricien), François FORRETT (facteur), Joseph MATHI (cheminot), François MULLER (menuisier), Pierre TACK (maçon), Pierre Nicolas SCHARF (surveillant), Michel MULLER (peintre), Charles RENNER (ouvrier), Camille GREBER (ouvrier), Charles BAUER (cheminot), Joseph Pierre EHR (mineur), Nicolas GILLE (commerçant), Lucien WILLAR (mineur), Pierre NEISIUS (mineur), Antoine EICHWALD (serrurier), Antoine WASSNER (boulanger), Emile BECKER (ouvrier), Jacques Martin ZENNER (commerçant).
Elections de 1935.
A ces municipales, le nombre de Conseillers à élire était de 27, car Algrange avait dépassé la barre des 10.000 habitants. Les élections eurent lieu les 5 et 12 mai. Encore une fois ce fut la liste conduite par le maire sortant, Louis KOPP, qui l’emporta. Elle portait à cette occasion le nom de : " Union Républicaine Démocratique " (U.R.D.) 13 membres furent élus au premier tour et les 14 autres au second tour
Le 13 mai 1935, les membres élus se réunirent pour voter le Maire et les adjoints.
Conseil municipal élu en 1935.
Maire : Louis KOPP. (ouvrier-tourneur)
Adjoints : Joseph MANSION (épicier), Nicolas GILLE (quincaillier), Nicolas JAPPELLE (invalide), Martin MEYER (ouvrier).
Conseillers : Joseph MATHI (cheminot), Pierre SCHARF (surveillant), Pierre TACK (maçon), Paul Pierre MULLER (ouvrier), Louis SCHMUCK (tailleur), Léon KOPS (ouvrier), François MULLER (menuisier), Emile BECKER (ouvrier), Lucien RISSER (ouvrier), Jean CASPAR (menuisier), Victor HABERKORN (commerçant), Léon MARQUIS (négociant), François HOSS (chef d’équipe), Joseph EHR (mineur), Emile SITTER (cheminot), Lucien WILLAR (mineur), Léon LEHMANN (employé), Léopold CLERY (menuisier), Louis LEDIG (chef porion), Louis HOFFMANN (ouvrier), Alfred DERRUAU (employé), Antoine WASSNER (boulanger).
Le Front populaire et les grèves de 1936 touchèrent la population algrangeoise. Les mines et la S.M.K. cessèrent leurs activités, les ouvriers étaient en grève comme dans le reste de la France. Celles-ci se terminèrent avec de nouveaux droits pour les travailleurs, l’augmentation substantielle des salaires, la semaine de 40 heures, les congés payés… Algrange allait être à nouveau annexée.
Pendant la seconde guerre mondiale 1939/1944.